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Bourses & résidences - HETIC, Montreuil.

CLOUDS IMPACTS, THE DOOR BEHIND


Sur l’invitation de sa nouvelle directrice Léa Peersman, Maud Louvrier Clerc devient la première artiste
en résidence à HETIC, l’école des métiers du web.


MAUD LOUVRIER-CLERC, UNE ARTISTE EN RÉSIDENCE À HETIC


« Une interdépendance généralisée ? Paul Valéry visait juste au tout début des années 1930 : “Le
temps du monde fini commence.” Qu’elles soient guerrières, religieuses ou climatiques, les
apocalypses ont cette vertu de révélation. Toute quête de sens se fait recherche d’une résonance. De
soi aux autres et à cette toute petite planète. Exister, c’est entrer en écho. Une identité vibratoire que
l’art contribue à libérer. Jusqu’au point de changer le cours des choses ? Le regard allègre de Maud
Louvrier-Clerc, plasticienne.


Investir les lieux, très peu pour elle. Il s’agit plutôt de se laisser envahir. Conviée début 2019 pour un
semestre de résidence artistique à HETIC – toute première du genre dans l’école – Maud Louvrier-Clerc
s’est laissé porter par l’inspiration. Ce souffle qui anime aussi dans le ciel la parade quotidienne des
cirrus, stratus et cumulus. Depuis la cour, ceux de Montreuil se reflètent aux étages supérieurs dans la
découpe géométrique des vitrages de l’école, installée dans d’anciens bâtiments industriels, et qui
abritent par ailleurs un cabinet d’architectes. Nuages, construction, réalité et virtualité : l’artiste laissait
son thème… prendre ses quartiers.


Imprégnation mutuelle


Ses quartiers ? Un local de plain-pied sur la cour. Son atelier pour six mois, une porte toujours ouverte.
En guise de bannière, une signature qui claque au vent : “Courant d’art”. Dans sa version intégrale,
l’intitulé de cette première résidence artistique à HETIC pose les jalons d’un territoire à défricher et
instaure le dialogue : “Clouds impacts, the door behind. Architecture réelle, architecture virtuelle.
Fusion, juxtaposition, friction ou collision ?” Une dissonance, quasi cacophonique ? La plasticienne s’en
rit, jamais aussi alerte que sur cette crête, en surplomb des contraires. L’un et le tout, c’est tout un.
Dessin, peinture, photographie, sculpture, design : son art est polymorphe, comme son esprit sans
cloisonnement.


Durant six mois à HETIC, c’est de circulation rhizomique qu’il est question. Au gré des rencontres,
curiosités ou timidités, une imprégnation mutuelle, comme une huile gagnerait la toile. “Cette
résidence artistique, c’est un atelier in situ. Je ne suis pas là pour produire quelque chose avec les
étudiants. Mais nous côtoyer est un bienfait. Cela infléchit et nourrit ma démarche. Les termes de
fusion et de friction sont venus s’ajouter à mon intitulé grâce aux apports sensibles des uns et des
autres.”


Créer l’aléatoire


Derrière la façade vitrée de l’atelier, la métamorphose opère, en temps réel. Depuis la page blanche,
l’œuvre éclot. Voir une artiste se colleter avec de la matière, dans une école où se travaille souvent de
l’immatériel, n’est pas la moindre des vertus de cette résidence. “Ce qui est étonnant, ce sont les
passerelles d’un domaine à l’autre. Je le vois par exemple avec la programmation : sur un modèle
brownien, les étudiants en viennent à créer de l’aléatoire, de la même manière que je peux le faire
dans un geste artistique”, rapproche Maud Louvrier-Clerc. De part en part, quelque chose d’un
déploiement. 

Descendre au plus profond de la vibration. Du figuratif vers l’abstraction, des formes à la texture, la
démarche artistique remonte la source de la perception. Vers ce lieu d’avant la séparation. “Réconcilier
l’inconciliable”, postule Maud Louvrier-Clerc. La trame des choses devient ici littéralement grille de
lecture. Impulsé avec le “Cloud impacts…”, le travail en résidence à HETIC mute en “pixellisation du
paysage”. Son filtre à elle – ne faudrait-il pas écrire son “philtre” ? – est une simple fibre de verre,
vendue en rouleau de quelques centimètres de largeur dans n’importe quel magasin de bricolage.
Appliquée sur la toile, cette bande ajourée décompose les représentations en une théorie de
minuscules carrés identiques. Du Matrix sur les cimaises.


Trait d’union


Historien des idées, psychiatre et spécialiste de la littérature, Jean Starobinski écrivait : “Si le monde
ne clochait pas, son mouvement s’arrêterait.” La logique mathématique a ses bienfaits, mais parée
d’accidents. Sur la toile, la peinture vient créer les tensions. Elle gagne la fibre de verre et provoque
d’imprévisibles dilatations. La surface plane prend du relief, comme une modélisation 3D sur un écran.
L’artiste est le démiurge, variant le jeu de pinceaux, les couches de matière. Travail manuel et
intellectuel, c’est idem. Le sens circule, cogne et essaime. “Tout cela nous constitue : fusion,
juxtaposition, friction et collision. Et même plus encore, quand nous savons lâcher prise”, postule
Maud Louvrier-Clerc. Elle qui se définit d’ailleurs volontiers plus comme chercheuse qu’artiste.


Sa recherche, c’est l’art du questionnement. D’une (re)mise en question. Ne pas choisir, aimer la
philosophie et la plongée sous-marine, l’astrophysique et la poésie, l’art et la psychologie. Le slash en
guise de trait d’union.


Son propre symbole de réconciliation, Maud Louvrier-Clerc l’a forgé avec le “carrond”, forme
élémentaire combinable à l’envi, imbriquant un carré et un rond. Une union de tous les contraires.
Rien de “perché” ou d’intello dans l’approche. “ Ce que je cherche, c’est le sens. Comment mettre
l’acte créatif au service de l’humain, de notre développement, comment ouvrir les portes, d’où “the
door behind”, comment la dématérialisation peut nous connecter à un autre monde.”

Stéphane de Torquat

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« Maud Louvrier-Clerc développe une démarche dans laquelle elle crée des rencontres. Dans ce
dialogue, dont elle provoque l’émergence, elle transmet ses pensées sur le monde ou plutôt ses
interrogations. L’échange qu’elle pratique relève d’une écologie relationnelle d’après Damien Delville,
géographe et anthropologue de la nature avec lequel elle poursuit aujourd’hui ses réflexions débutées
avec l’historien d’art Romain Arazm en 2012. Ces moments de partage transdisciplinaires lui servent
de terreau pour déplier de nouvelles pistes, tenter d’approcher des brides de réponses, qu’elle agrège,
transforme ensuite, dans la solitude de son atelier, avec l’utilisation de nouveaux matériaux et vers le
développement de nouvelles formes.


Comment l’architecture réelle et l’architecture virtuelle se rencontrent ? De quelle manière la fusion
s’opère-telle ? Comment se met peu à peu en place une juxtaposition des mondes, des réalités
parallèles ? Quelle friction entre réalité et virtuel ? Y’a-t-il un danger de collision ? telles sont les
questions auxquelles l’artiste tente actuellement de répondre au travers de ses échanges avec les
étudiants de l’école des métiers du web, HETIC à Montreuil où elle est en résidence. L’artiste privilégie
une fois encore dans sa quête l’interactions avec les autres.


Au sein d’HETIC, où elle a installé son atelier, sa résidence la conduit à tester les réactions des étudiants
au contact de ses œuvres. Pour se confronter au digital, la plasticienne choisit la peinture et suite à
son immersion sur le territoire, caractérisé par de grands travaux, des matériaux de construction et
une recherche photographique. Par la contrainte de ce protocole de création, elle prête d’autant plus
attention à la fragilité de la matière. « On se déplace, on reconstruit. Chaque nouvelle construction
change notre regard » précise-t-elle. Maud Louvrier-Clerc interroge ainsi une renaissance à venir et
elle met en lumière la possibilité de changement.


Pauline Lisowski, 7 mars 2019


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Pourquoi ce titre ?

HETIC est une école des métiers du web. J’imagine ainsi les étudiants baignés en permanence dans la
vapeur d’un COULD, d’un monde virtuel, dématérialisé. De mon côté, je travaille depuis plus d’un an
déjà sur le thème du nuage au travers de ma série : Ceci n’est pas un nuage ! dans le cadre de ma
future exposition « Climat, la nouvelle Apocalypse ». Le parallèle me semblait intéressant et ce nuage
qui pour eux comme pour moi est spécifique me semble notre premier point de rencontre.


En filant la métaphore et la prospective, il m’apparaît que nos thèmes de prédilection, pour eux le
digital, pour moi le développement durable, ont un impact respectif fort sur nos modes de vie. Nos
nuages, nos CLOUDS et leurs impacts ouvrent de nouvelles portes. Portes cachées, portes dérobées
comme dans certains programmes où il faut avoir la clé, l’accès, les codes pour entrer. L’anglais enfin
a surgit, peut être en lien avec ce défi de contagion planétaire, une langue devient une pierre angulaire
pour communiquer.


Pourquoi le thème de l’architecture ?


Je m’intéresse à l’architecture depuis très longtemps, puisque adolescente j’étais fascinée par les
espaces : maisons, immeubles, jardins ou châteaux, et j’ai dessiné des plans d’une ville futuriste où des
canaux aquatiques remplaçaient les axes routiers notamment. Depuis quelques années, l’architecture
n’arrête pas de croiser ma route, en 2016 je suis invitée par le Centre des Monuments nationaux à
imaginer une exposition personnelle à la villa Savoye de Le Corbusier « Outside, Inside ». Cela me
conduit ensuite au Château de Maison Laffite construit par Mansart, maitre de l’architecture classique
française, une nouvelle fois invitée le Centre des Monuments nationaux à imaginer une exposition
collective cette fois autour du design en 2016 « Les nouvelles formes d’équilibre ». En 2018, je
rencontre l’ architecte, Antoine Souché avec lequel j’entame des réflexions sur un projet de pavillon
et j’entame des réflexions poussées sur mon appréhension de l’espace en lien avec la thématique du
bien être en ville et le développement durable. Cela me conduit sur la piste des « natural killers «
(bienfaits des bains de forêt ou Shinrin-yoku) et des ions négatifs (Effet Lenard, bienfaits de l’eau salé)
que mon pavillon Sanctuary entend offrir. En novembre 2018 dans le cadre de mon projet JEMONDE,
j’ai ainsi l’idée de créer un autre pavillon dans le cadre de ma candidature pour l’exposition universelle
de Dubai, et deux architectes Alia Ben Amar et Donald Douilloux acceptent de collaborer avec moi. En
décembre 2018, l’agence d’architecture LDRP me contacte pour imaginer des collaborations au travers
de leur maison d’Edition Les Optimistes. En tant qu’artiste-chercheuse, je crée des architectures
mentales et conceptuelles et en tant que plasticienne, je les modèle dans la réalité physique.


Mais qu’en est-il de l’architecture virtuelle ? Comment la nouvelle génération élabore-t-elle les espaces
dématérialisés. Quelles conséquences ? Y’a—t-il des passerelles ? Des différences indomptables ?
Quelle complémentarité ? Quel antagonisme ?


Ma résidence artistique a vocation à déplier ces questionnements. Pour faciliter les échanges et le
dialogue avec les étudiants, mon atelier leur sera ouvert en permanence et des apéro arty seront
organisés chaque jeudi soir.

 

Presse:
2019

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